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Les femmes du Cabo Delgado, premières victimes des djihadistes au Mozambique

Une sœur assassinée, des cousins enlevés, deux nièces, encore adolescentes, kidnappées et violées… La famille du pasteur José (les prénoms ont été modifiés à la demande des intéressés) a payé un lourd tribut à la guerre qui déchire la province du Cabo Delgado, dans le nord-est du Mozambique. Ralliés à l’Etat islamique (EI) en 2018, les insurgés d’Ansar Al-Sunna, localement appelés Al-Chabab (« les jeunes », en arabe), sont repartis à l’offensive en décembre, multipliant les attaques contre des villages, des bâtiments publics et des positions militaires.
Selon le décompte du site spécialisé Cabo Ligado, près de 5 000 personnes sont mortes au Cabo Delgado depuis octobre 2017. Le déploiement de l’armée mozambicaine et de 2 500 soldats rwandais dans la région, au printemps 2021, avait obligé les djihadistes à battre en retraite. Mais l’insurrection est loin d’être éteinte. D’après l’Organisation internationale pour les migrations (OIM), le regain de violences des derniers mois a poussé plus de 110 000 personnes à fuir leur foyer entre le 22 décembre et le 8 mars. Un chiffre qui porte à plus d’un million le nombre total de déplacés dans le pays.
Les femmes sont particulièrement visées par les rebelles. En 2021, l’ONG Human Rights Watch (HRW) affirmait qu’au moins 600 d’entre elles avaient été enlevées par des combattants d’Ansar Al-Sunna et emmenées dans des camps tenus par les insurgés pour être mariées de force et servir d’esclaves sexuelles. Une estimation très en deçà de la réalité, selon le pasteur José, alors que les raids contre les civils sont devenus incessants dans la province.
Le religieux anglican est connu à Pemba, la capitale du Cabo Delgado, pour aider financièrement et moralement une trentaine de femmes ayant réussi à fuir les Chabab ou secourues par les forces mozambicaines et rwandaises. Il collabore notamment avec l’Eglise presbytérienne du Mozambique, une des rares organisations à venir en aide aux victimes de viols, souvent stigmatisées dans leurs communautés.
De crainte d’être vue, Sharmila jette un regard par-dessus son épaule avant d’entrer dans la maison du pasteur, située dans un quartier populaire de Pemba. Un matin de février 2021, elle a été kidnappée par Ansar Al-Sunna alors qu’elle cultivait son champ à proximité de Mocimboa da Praia, une petite ville portuaire tenue par les islamistes d’août 2020 à août 2021. Libérée un an plus tard par des soldats mozambicains et rwandais, elle vit aujourd’hui à Pemba, hébergée par des amis du pasteur.
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